Torquay, petite ville portuaire de sud de l'Angleterre, 1902. Depuis le décès de son père, survenu un an auparavant, Agatha "Aggie" Caroline Morton habite seule avec sa mère et sa grand-mère. Au grand dam de ces deux femmes très attachées aux traditions et à la bienséance, la jeune fille de douze ans manifeste un goût non dissimulé pour les histoires macabres et les enquêtes policières. Aussi est-elle plus excitée que traumatisée lorsqu'elle découvre un corps sans vie sous le piano du studio de danse des Sirènes. La victime est Irma Eversham, une vieille dame acariâtre et insupportable, qui était détestée de tous. L'enquête ne tarde d'ailleurs pas à révéler que la mégère a été empoisonnée et que deux de ses doigts étaient refermés autour d'un minuscule bout de papier arraché à une feuille. Que contenait donc cette dernière pour que quelqu'un soit prêt à tuer pour s'en emparer? Les soupçons des enquêteurs se portent rapidement sur miss Marianne, la belle-fille de la défunte, qui dérange les bien-pensants en prônant l'abolition des corsets et en affirmant que les femmes devraient avoir le droit de vote. Aggie est cependant bien décidée à innocenter sa professeure de piano, n'hésitant pas à mettre sa propre vie en danger pour mener sa propre enquête en compagnie d'Hector Perot, un jeune réfugié belge récemment arrivé dans la région qui est hébergé par le presbytère... [SDM] Un roman policier captivant, qui invite à plonger dans l'Angleterre du tout début du 20e siècle sur les traces d'une jeune fille frondeuse, téméraire et vive d'esprit, qui ne se laisse pas impressionner facilement et qui se passionne pour les histoires macabres. Douée d'une curiosité insatiable, d'une imagination folle et d'un sens aigu de l'observation, elle n'a aucun talent pour les bavardages futiles et sa timidité maladive complexifie hautement sa vie sociale. Ses amis ont d'ailleurs tous été imaginaires jusqu'à ce qu'elle rencontre Hector, un garçon intelligent et excessivement poli, qui partage son amour des sucreries et des romans policiers (notamment ceux de Sherlock Holmes). Tous deux forment un tandem extrêmement attachant que l'on prend plaisir à suivre dans une enquête complexe et fort bien menée qu'ils résolvent avant les policiers (auxquels ils n'hésitent pas à cacher des preuves). Ceci au coeur d'une société anglaise pieuse, obtuse et remplie de préjugés à l'égard des étrangers (Victor y compris). Une réflexion sur la condition des femmes nourrit également le récit, brodé autour d'un être cupide, désireux de mettre la main sur un héritage généreux. La douleur que le meurtre réveille chez Aggie, préadolescente empathique qui souffre toujours de l'absence de son père et qui comprend bien le deuil vécu par les proches de la défunte, apporte également une touche de profondeur au texte, narré dans une langue riche et élégante faisant écho aux origines bourgeoises de l'héroïne. Des extraits des poèmes et des histoires que cette dernière invente en laissant vagabonder son imaginaire débordant égaient la narration, également jalonnée d'extraits du ##Journal de Torquay##. [SDM]